Une loi en attente deux ans après le drame du Rana Plaza

par Rozenn Le Saint / 27 avril 2015

Le deuxième anniversaire du drame du Rana Plaza, au Bangladesh, sonne l’heure du bilan, insatisfaisant : les entreprises traînent les pieds pour indemniser les victimes et, en France, le vote au Sénat de la proposition de loi sur leur devoir de vigilance n’est toujours pas programmé.

Deux ans après le drame du Rana Plaza, au Bangladesh, l’Assemblée nationale a voté en première lecture, le 30 mars dernier, une proposition de loi sur le devoir de vigilance des entreprises donneuses d’ordres. Celle-ci a néanmoins été édulcorée par rapport au premier texte proposé par trois parlementaires : Danielle Auroi, députée écologiste du Puy-de-Dôme et présidente de la Commission des affaires européennes, Dominique Potier, député socialiste de Meurthe-et-Moselle, et Philippe Nogues, lui aussi député socialiste et président du groupe d’études sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE) (voir l’article de Santé & Travail).

« Opposition frontale » du patronat

« Nous avons soutenu le projet de loi face à une opposition frontale du Medef et de l’Association française des entreprises privées (Afep), l’organe des grands groupes, qui ont écrasé la voix des entreprises en avance sur le sujet et qui parviennent à retarder l’examen de la loi au Sénat », regrette Nayla Ajaltouni, vice-présidente du collectif Ethique sur l’étiquette. C’est pourquoi ce collectif ainsi que des ONG comme Amnesty International et Sherpa, s’inquiétant du « risque d’enlisement du texte », exigent dans un communiqué que le gouvernement annonce la date de l’examen de la proposition de loi au Sénat.

Par ailleurs, il manque toujours 6 millions de dollars sur les 30 millions nécessaires pour indemniser les familles des 1 134 morts et 1 500 blessés. Après moult tergiversations, Benetton a été le dernier à annoncer, le 17 avril, qu’il allait abonder de 1,1 million de dollars le fonds d’indemnisation des victimes, une somme jugée insuffisante par des ONG comme Clean Clothes Campaign (CCC), qui lui réclame 5 millions de dollars. Une dizaine de marques n’auraient toujours pas mis la main à la poche.

Renforcer les droits des travailleurs

Au niveau des conditions de travail, « des efforts sont en cours pour améliorer la sécurité dans les usines, mais le gouvernement et les marques occidentales peuvent et doivent faire plus pour que les standards internationaux s’appliquent aux droits des travailleurs », estime l’ONG Human Rights Watch (HRW) dans le rapport Ceux qui relèvent la tête souffrent le plus, publié le 23 avril.

LE COMITÉ PERMANENT AMIANTE BLANCHI PAR LA JUSTICE

Martine Aubry a été définitivement mise hors de cause, le 14 avril, dans l’action judiciaire engagée concernant l’empoisonnement de salariés de l’usine Ferodo-Valeo de Condé-sur-Noireau (Calvados). Enième rebondissement dans cette procédure ouverte en 1997, la Cour de cassation a rejeté un pourvoi contre l’annulation de la mise en examen des principaux membres du Comité permanent amiante – structure de lobbying des industriels de l’amiante –, dont Martine Aubry, directrice des Relations du travail au moment des faits. L’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva), la Fnath (Association des accidentés de la vie) et le Comité anti-amiante Jussieu se sont insurgés dans un communiqué contre la décision, assimilée à une « faillite de l’institution judiciaire ».

En savoir plus
  • Le communiqué de presse de Force Ouvrière, « Les invalides pénalisés », contestant la réforme en cours du barème d’indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelles. Les partenaires sociaux n’y seraient pas associés et les aspects médicaux seraient seuls pris en compte, au risque d’occulter les incidences professionnelles des atteintes à santé, donc de restreindre l’indemnisation.

  • L’article « Suicide chez Orange : le rapport accablant de l’Inspection du travail » paru dans L’Humanité du 16 avril.

  • L’article de Sud-Ouest sur les résultats d’études menées par l’Institut finnois de santé au travail démontrant le lien entre une durée de travail excessive et le risque cardiovasculaire, le stress ou encore l’alcoolisme. Résultats commentés dans un article (en anglais) de la revue américaine Harvard Business Review.

  • Un article de Bastamag présentant « Insecticide mon amour », le documentaire d’un ouvrier agricole contre les pesticides.