Les inspecteurs du travail en proie à la souffrance

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Laurence Théry directrice adjointe du travail
/ avril 2012

En moins d'un an, deux inspecteurs du travail ont mis fin à leurs jours. Les témoignages d'incompréhension face à l'évolution de leur métier qu'ils ont laissés ont bouleversé les agents de ce corps de contrôle, en proie à la souffrance, à l'épuisement professionnel et au doute.

Déjà, en 2004, l'assassinat de deux contrôleurs en Dordogne avait malmené l'institution, désemparée face à la montée de la violence envers elle et au soutien relatif manifesté par les autorités politiques. Depuis, une politique du travail s'est mise en place, avec des priorités d'action et un soutien méthodologique. Mais cela ne semble pas suffisant. Face aux pressions patronales, au mécontentement des salariés, aux dilemmes posés par la complexité de cette activité, notamment concernant la stratégie des relations à développer avec les entreprises, il faut un soutien quotidien et politique.

Aujourd'hui, ces gestes désespérés font surgir des questions incontournables sur le sens du métier de contrôleur ou d'inspecteur du travail. Comment s'accommoder d'un droit moins protecteur, plus complexe à contrôler, sans cesse contesté ? Comment tenir, face aux conséquences sociales de la crise qui accroissent les sollicitations vis-à-vis de l'Inspection du travail, quand les effectifs de secrétariat en appui aux sections d'inspection diminuent ? Comment se satisfaire d'une évaluation uniquement quantitative de l'activité - la fameuse politique du chiffre -, qui place la ligne hiérarchique, considérablement renforcée depuis huit ans, dans la position de dire qui est performant et qui ne l'est pas ? Qu'est-ce qu'une activité performante et qui en décide ?

On le voit bien, ces questions mériteraient un vaste débat. Les garants de l'ordre public social ne sont pas les seuls concernés, même si les agents et leurs représentants doivent avoir leur mot à dire. Il faut organiser leur expression collective, mais, au-delà, ce sont tous les acteurs sociaux qui doivent en discuter.