Les retraites financées sur le dos des victimes du travail ?

par Clotilde de Gastines / 26 octobre 2015

En contrepartie d’une augmentation des cotisations employeurs aux régimes de retraite complémentaire, le gouvernement prévoit de diminuer les cotisations patronales à la branche accident du travail-maladie professionnelle.

L’accord qui doit être signé le 30 octobre par les partenaires sociaux sur l’avenir des caisses de retraite complémentaire (Agirc-Arrco) pourrait avoir des conséquences sur l’indemnisation des victimes du travail. C’est ce que dénoncent la Fnath, association des accidentés de la vie, et l’Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) dans un communiqué commun.

En échange de la revalorisation des cotisations des employeurs aux régimes de retraite complémentaire à compter de 2019, l’Etat se serait en effet engagé auprès du Medef à baisser de 0,02 % les cotisations patronales à la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) au prétexte qu’elle est excédentaire. Soit une ristourne de 300 millions d'euro. Cette promesse du gouvernement n'aurait pas été mise sur la table des négociations, lors des discussions entre partenaires sociaux sur les retraites complémentaires, conclues le 16 octobre dernier.

Or l'Etat a déjà prévu de puiser 800 millions dans la branche AT-MP pour renflouer la branche maladie de la Sécurité sociale : en organisant notamment le transfert d'une partie des cotisations patronales d'une branche à l'autre, à hauteur de 0,05 % et pour deux années consécutives. « Mais le provisoire risque de durer », craint Hervé Garnier de la CFDT.

Bien qu’excédentaire, la branche AT-MP cumule une dette de près d'1,1 milliard. Et son excédent provient en partie de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance des atteintes professionnelles, prises en charge par le régime général. Au moins pour un milliard d’euros, selon la dernière estimation de la Cour des comptes. Une réduction de ses ressources risque de se traduire par un durcissement des conditions d’accès à la réparation, craignent les associations de victimes.

PRESSIONS SUR L’INSPECTION DU TRAVAIL

Lors d’une audience houleuse au tribunal d’Annecy, le 16 octobre dernier, le procureur de la République a requis 5 000 euros d'amende à l'encontre de Laura Pfeiffer, une inspectrice du travail poursuivie en correctionnelle par le groupe Tefal pour avoir transmis aux syndicats de sa profession des mails internes à ce dernier. Ces mails révèlent que le groupe a exercé des pressions sur l’ex-directeur départemental du travail, Philippe Dumont, afin de mettre un terme aux interventions de l’inspectrice sur l’accord 35 heures de l’entreprise, dont elle avait demandé la renégociation. Des actes susceptibles de caractériser un délit d'« obstacle à la fonction d’inspecteur du travail », pour lequel Laura Pfeiffer a déposé une plainte, toujours pas instruite. Une justice à deux vitesses dénoncée par les syndicats de l’Inspection du travail, qui ont demandé la relaxe de l’inspectrice. Délibéré le 4 décembre.

LA LOI RANA PLAZA MENACÉE

De dirige-t-on vers une suppression de la proposition de loi sur le devoir de vigilance des multinationales sur leurs chaînes d’approvisionnement, qui fait suite à la catastrophe du Rana Plaza au Bangladesh ? A l’occasion de son examen par le Sénat, le rapporteur du texte, Christophe-André Frassa (Les Républicains), a proposé la suppression pure et simple des trois articles constituant la loi. De quoi susciter des craintes sur l’avenir du texte, comme s’en inquiète le site Novethic.fr Réponse le 18 novembre, date à laquelle le débat sur la loi a été reporté.

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