1898-1939 : le prix des corps accidentés

par Anne-Sophie Bruno historienne (Centre d'histoire sociale du XXe siècle à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) / octobre 2015

Aux termes de la loi de 1898 sur les accidents du travail, la rente versée à la victime dépend du taux d'incapacité qui lui est attribué. Un taux laissé, jusqu'au barème de 1939, à l'appréciation, très inégale, des médecins et des juges.

A la fin du XIXe siècle, les sociétés industrielles voient se multiplier les législations instituant une indemnisation des accidents du travail. La plupart d'entre elles reposent sur un compromis : elles instaurent une réparation forfaitaire (seul le préjudice économique est indemnisé, et ce, partiellement), qui vient en contrepartie de son automaticité (l'accident est présumé imputable au travail, la victime n'ayant aucune preuve à fournir). En France, où la loi a été adoptée en 1898, ainsi qu'en Belgique, la réparation se fait sur la base de la moitié du salaire de référence, quand l'Allemagne la fixe aux deux tiers.

Tarification officieuse des organes

Plus ou moins généreux, le principe du forfait ne clôt pas pour autant les conflits autour du montant de l'indemnisation, qui se reportent sur la partie inconnue de l'équation instituée par voie législative : le taux d'incapacité permanente partielle (IPP). En effet, pour calculer la rente perçue par l'accidenté, la part de salaire prise en compte est multipliée par le taux d'IPP. L'évaluation de ce dernier constitue dès lors un enjeu crucial.

Dans la pratique, trois systèmes vont vite s'opposer. L'un, pratiqué en...

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