Bernardino Ramazzini : le "défricheur" de la santé au travail

par Julien Vincent maître de conférences en histoire des sciences à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / avril 2014

En 1700, avec son traité des maladies des artisans, ce médecin italien ouvre un champ d'étude inexploré : la santé au travail. Mais faut-il voir en lui, comme il est d'usage, le précurseur de la médecine du travail ? Pas si sûr...

Le champ que je défriche n'a été parcouru par personne." En publiant son De morbis artificum diatriba ("traité des maladies des artisans") en 1700, à près de 60 ans, Bernardino Ramazzini avait clairement conscience d'introduire un sujet nouveau. Il n'est guère étonnant que la médecine du travail, née au XXe siècle, ait vu en lui un père fondateur. Par son souci des gestes des travailleurs, il semble être le précurseur de l'ergonomie. Par son attention à la qualité de l'eau, de l'air, et au rôle des substances minérales, il paraît poser les bases de l'hygiène industrielle et de la toxicologie. Mais l'évidence apparente de la filiation peut faire oublier à quel point les manières de comprendre le traité de Ramazzini ont varié, depuis plus de trois siècles, en fonction des contextes et des traditions qui s'en revendiquaient. Saisir l'homme dans son époque, et non comme le préfigurateur de pratiques médicales inventées après lui, permet de rappeler que rien ne prédisposait le médecin italien à étudier les maladies des artisans, que son intérêt pour le sujet a été tardif et qu'il est le produit de circonstances précises.

Une culture humaniste

Né en 1633 à Carpi, près de Modène...

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