Un code de déontologie imposé à l’Inspection du travail

par Rozenn Le Saint / 03 mai 2017

Le décret instaurant un code de déontologie pour les inspecteurs du travail a été publié le 14 avril au Journal officiel. Les syndicats craignent qu’il n’offre aux entreprises contrôlées une opportunité pour mettre en cause l’indépendance des agents et compliquer leur tâche.

Les inspecteurs du travail se battent depuis l’automne dernier contre la mise en place d’un code de déontologie, prévu par la loi El Khomri. Sans succès. Malgré la demande de retrait de ce texte par une intersyndicale et une pétition en ligne, le décret d’application actant son entrée en vigueur a été publié le 14 avril au Journal officiel. Que craignent les syndicats ? « Que ce code soit manipulé par les employeurs pour semer la suspicion sur l’indépendance des agents de contrôle », résume Bernadette Baron, élue Snu Tefe-FSU au comité technique ministériel, qui a adressé ses griefs au ministère du Travail.

Ce nouveau code restreint en effet la liberté d’expression publique des agents, notamment sur leur métier, selon l’intersyndicale. Dans un contexte marqué par des tentatives d’intimidation patronales, Bernadette Baron redoute que les employeurs « cherchent, y compris sur Internet, tout élément qui remettrait en cause la neutralité et l’intégrité des agents de l’Inspection du travail, s’ils se sont exprimés en tant que citoyens sur un sujet ou un autre ».

Quelques améliorations obtenues

En outre, le code contient des préconisations qui concernent le fonctionnement interne des services d’inspection, ce qui ne relève pas de la déontologie selon les syndicats. Malgré la mise en avant d’une charte de déontologie déjà établie en 2010, qui suffisait à rappeler les grands principes à respecter, l’intersyndicale n’a pas eu gain de cause sur sa demande de retrait du code auprès de la ministre du Travail.

En revanche, elle a obtenu des aménagements sur la première version, présentée en octobre. A commencer par la prestation de serment, qui ne portera plus sur le respect du code en tant que tel, mais sur une conduite à tenir dans le cadre de l’exercice des fonctions : dignité, impartialité, intégrité, neutralité, probité. Enfin, le code de déontologie concernera l’ensemble de la hiérarchie, et pas seulement les agents de contrôle, comme prévu initialement…

 

 

UNE ENQUÊTE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SUR TRISKALIA

Ce 25 avril, les salariés de la coopérative bretonne Triskalia intoxiqués par des pesticides ont obtenu une nouvelle victoire, cette fois à l’échelle européenne. A leur demande, la commission des pétitions du Parlement européen a demandé le lancement d’une enquête sur les conditions d’utilisation des phytosanitaires dans l’entreprise, afin de déterminer la responsabilité de l’employeur, mais aussi de l’Etat, suspecté de ne pas avoir respecté des directives européennes relatives à l’usage des pesticides.

Tout a commencé avec la reconnaissance, par le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) de Saint-Brieuc, de la « faute inexcusable » de Nutréa, filiale de Triskalia, suite à l’intoxication de deux anciens salariés. Dans la foulée, leurs défenseurs ont souhaité saisir la Commission des pétitions du Parlement européen. Une requête appuyée par une pétition en ligne, « Empoisonnés par les pesticides, nous sommes tous concernés », signée par plus de 82 500 personnes. En mars 2016, une délégation des salariés concernés étaient auditionnée par la commission.

« Seulement un quart des demandes d’enquête comme la nôtre à la Commission européenne sont acceptées, c’était déjà une victoire », souligne Serge Le Quéau, porte-parole de l’Union syndicale régionale Solidaires de Bretagne et défenseur des victimes de Triskalia. Pour ce dernier, l’appel aux autorités européennes était nécessaire, car « en Bretagne, Triskalia est un Etat dans l’Etat : les hauts fonctionnaires de la protection de la santé et de l’environnement sont dans l’incapacité de réaliser leur travail du fait des pressions exercées », assure-t-il. Suite à la décision de la commission, des experts européens devraient donc se rendre en Bretagne, « cet été ou cet automne », selon Serge Le Quéau.

A LIRE AILLEURS SUR LE WEB
  • Afin d’expliquer les changements apportés par la loi El Khomri dans le fonctionnement de la médecine du travail, le ministère du Travail vient de publier sur son site une série de questions/réponses.