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Covid-19 : plus d’un quart des clusters sur les lieux de travail

par Eliane Patriarca / 03 septembre 2020

Les foyers de contamination ont essaimé pendant l’été dans les entreprises et les administrations. Au point que Santé publique France s’est penchée sur la répartition de ces clusters par secteur d’activité. Selon son décompte, la fonction publique arrive en tête.

Depuis cet été, les foyers de contamination au Covid-19 en milieu professionnel se sont multipliés. Selon Santé publique France, plus d’un quart des clusters1 en France émanent en effet des entreprises privées ou publiques, et ceci hors milieu hospitalier ou établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Son point épidémiologique du 20 août montre que le nombre de clusters professionnels a récemment bondi : 73 % ont été signalés entre le 1er juillet et le 12 août. Sur cette période, leur proportion se monte à 43 %, alors qu'ils représentaient seulement 20 % de l’ensemble des clusters repérés en mai et juin !
En tête de la liste des sites où l’on risque de s’infecter actuellement, on trouve donc les entreprises privées et publiques : selon le dernier point épidémiologique, en date du 3 septembre, elles regroupent 29 % de tous les clusters identifiés en France depuis le 9 mai. Viennent ensuite le « milieu familial élargi » et les « évènements publics/privés rassemblant de manière temporaire des personnes », avec 26 %. Quant aux établissements de santé, ils en regroupent 13 %. Le reste s’éparpille entre établissements sociaux d’hébergement, centres d’accueil de personnes handicapées, communauté de gens du voyage et migrants, écoles et universités, crèches, prisons…

Le secteur public en première ligne

Pour la première fois, Santé publique France a détaillé la répartition des foyers par secteur d’activité. Parmi les 189 clusters professionnels enregistrés du 9 mai au 18 août, 51 soit 29 % ont été détectés au sein du secteur public : il s’agit d’abord des forces de police et de sécurité (39 %), des autres administrations (justice, impôts…) (22 %), des services des pompiers et des secours (16 %), et des militaires (14 %).  
Deuxième secteur le plus touché : l’industrie manufacturière avec 28 clusters (16 %), dont une grande majorité dans les abattoirs. Viennent ensuite l’hébergement et la restauration avec 16 clusters (9 %), le commerce et la réparation d’automobiles et de motocycles avec 14 clusters (8 %). Les 69 autres clusters professionnels « sont répartis dans 14 sections professionnelles qui regroupent chacune moins de 8 clusters », indique le point épidémiologique, sans fournir plus de précision.

« Reprise du travail en présentiel »

Interrogée par Santé & Travail, l’agence nationale de santé publique n’a pas souhaité expliquer ni commenter ces données, en particulier cette hausse brutale dans une période où beaucoup de salariés sont en congés. Elle a finalement donné par mail un élément de réponse sommaire : « Plusieurs hypothèses pourraient expliquer cette augmentation. Tout d’abord, la reprise progressive des entreprises après le déconfinement, et la reprise du travail en présentiel au cours de l’été. Puis également, conjugué à cela, le relâchement observé des mesures barrières et de la distanciation sociale, de manière générale, y compris sur les lieux du travail, favorise les chaines de transmission et la survenue de clusters. »
Le port obligatoire du masque sur les lieux de travail et le règlement sanitaire en entreprise entré en vigueur le 2 septembre suffiront-ils à enrayer le foisonnement de clusters professionnels ?

Le circuit de « contact tracing »
Eliane Patriarca

Lorsqu’un cluster est détecté, ce sont les Agences régionales de santé (ARS) qui sont chargées du « contact tracing », c’est-à-dire de l’ensemble des actions visant à limiter la diffusion du virus à partir des nouveaux cas, à détecter et briser prospectivement les chaînes de transmission le plus rapidement possible. Ce dispositif se déploie à trois niveaux : d’abord, les médecins de ville, premiers maillons de la recherche de contacts, qui font procéder au test de dépistage, interroge le malade pour connaître les personnes qu’il a croisées. Il transmet ces informations à la base de données « Contact Covid ». L’Assurance maladie prend le relais pour mener une enquête sanitaire auprès du malade et avertir ses relations. Puis les plateformes départementales de l’Assurance maladie interviennent pour la prise en charge des cas contacts identifiés qui doivent s’isoler et se voient délivrer, si le télétravail est impossible par exemple, un arrêt de travail. Enfin les ARS et Santé publique France prennent en charge l’identification des chaines de transmission.

 

  • 1Santé publique France, qui s’appuie sur les données collectées par les Agences régionales de santé, définit un cluster par « au moins trois cas confirmés ou probables, dans une période de sept jours, appartenant à une même communauté ou ayant participé à un même rassemblement de personnes ».