© Fabrice Pellé

La fonction publique en burn-out

par Stéphane Vincent, rédacteur en chef adjoint / janvier 2023

Epuisés, découragés… Ces dernières années, le débat public s’est fait l’écho régulièrement de la détresse exprimée par des fonctionnaires… A l’hôpital, mais aussi dans l’enseignement, la justice, etc. Ce n’est pas un concours de circonstances. Il faut y voir le résultat d’une modernisation de l’Etat menée sans concertation avec les agents, souvent au détriment de leurs conditions de travail. La mise en œuvre du concept de New Public Management et les réformes lancées depuis 2007 se sont accompagnées, entre autres, de réductions d’effectifs, de l’instauration d’une politique du chiffre et de logiques de production inspirées du privé, peu compatibles avec le maintien d’un service public de qualité. Une source de souffrance éthique pour les agents, qui ne peuvent plus mener à bien leur travail. Mais cela ne s’arrête pas là. Car les fonctionnaires, au sein de l’Etat, à l’hôpital ou dans les collectivités locales, sont particulièrement mal lotis en matière de prévention des risques professionnels. Du fait notamment d’un cadre réglementaire peu contraignant pour les employeurs, de pouvoirs limités accordés aux préventeurs, d’une tendance aussi des agents à s’oublier dans l’exercice de leurs missions, les atteintes à la santé liées au travail sont invisibilisées dans la fonction publique. Un voile pesant qu’il s’agit de lever, ce que des administrations et acteurs de terrain tentent de faire, non sans difficulté.

© Fabrice Pellé
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Du coût social et psychique de la modernisation de l’Etat

par Stéphane Le Lay, sociologue du travail, Institut de psychodynamique du travail (IPDT) / janvier 2023

Les principes et méthodes appliqués pour transformer les organisations du travail au sein des administrations et du secteur public ont abouti à une profonde dégradation de la situation des agents. Souffrance éthique et découragement à la clef.

Depuis maintenant plusieurs décennies, les transformations des organisations du travail mises en œuvre dans les trois fonctions publiques (hospitalière, territoriale et d’Etat) et les entreprises de service public ont eu des répercussions profondes, à la fois sur les conditions de réalisation des activités, la qualité du travail et la santé des agents et salariés. Passés longtemps sous silence, ces effets néfastes d’une course à la « modernisation » de l’Etat se sont donnés à voir et entendre plus clairement à l’occasion de la pandémie de Covid-19, à la suite de laquelle des milliers de professionnels, dans de nombreux secteurs d’activité, ont remis en question leur engagement dans le travail, en raison d’une perte de sens de ce dernier.
Pour bien comprendre les phénomènes dont il est question ici, il est nécessaire d’en passer par l’analyse d’un ensemble de conceptions et d’outils managériaux venus des pays anglo-saxons, aménagés par des hauts fonctionnaires et des hommes politiques français dans le cadre de « réformes », dont la plus emblématique fut sans doute la révision générale des politiques publiques (RGPP), déployée entre 2007 et 2012 durant la présidence Sarkozy.

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