Une étude pour épargner le coeur des soignants

par Régis de Gaudemaris professeur de médecine et santé au travail / juillet 2011

Conduite en 2006 et 2008 dans sept centres hospitaliers universitaires (CHU), l'étude " Organisation des soins et santé des soignants " (Orsosa) vise à identifier les contraintes psychologiques et organisationnelles auxquelles sont confrontés les professionnels de santé. Son objectif est à la fois d'évaluer les risques pour la santé associés à ces contraintes, notamment du point de vue cardiovasculaire, et de faciliter la mise en place de mesures de prévention collectives. Menée sur un échantillon de 210 unités fonctionnelles (UF), auprès de 2 488 infirmières et 1 681 aides-soignantes, elle a recueilli sur les deux années des données sur leur santé mentale, cardiovasculaire et musculo-squelettique.

Un questionnaire spécifique a également permis d'évaluer les contraintes psychologiques et organisationnelles perçues par les personnels. Celui-ci, sur la base de 22 questions, a servi à établir un score de contrainte sur huit dimensions indépendantes : organisation qui ne permet pas la communication ; manque de soutien du cadre infirmier ; effectifs insuffisants pour faire le travail ; manque de partage des valeurs du travail ; manque de soutien de l'administration ; interruptions durant les tâches ; mauvaises relations entre soignants ; organisation qui ne permet pas le respect des congés. Enfin, en complément, des mesures objectives et des observations ergonomiques standardisées ont analysé l'activité, les incidents et dysfonctionnements, ainsi que la communication dans chacune des unités fonctionnelles.

Diagnostic rapide. Il existe une bonne concordance statistique entre la perception des contraintes des soignants, telle que mesurée par le questionnaire, et les mesures objectives indépendantes. Par ailleurs, les scores de contrainte obtenus via le questionnaire ont été confrontés en aveugle à une approche classique de psychologue du travail, avec une concordance forte entre ces deux démarches, ce qui valide a posteriori la méthode de diagnostic rapide via le questionnaire. Enfin, les résultats de travaux de recherche en cours attestent les liens entre les contraintes perçues et l'état de santé mentale ou cardiovasculaire.

En conséquence, un seuil d'alerte a été établi arbitrairement et séparément pour les infirmières et les aides-soignantes concernant chacune des huit dimensions du questionnaire. Les résultats de l'étude font l'objet d'une restitution auprès des équipes soignantes de chaque unité fonctionnelle. Et une réunion rassemblant tous les acteurs doit permettre, dans un deuxième temps, la recherche collective de solutions correctives et/ou préventives. Enfin, la démarche va être étendue au sein d'hôpitaux de proximité.