Garantir l’accès aux droits pour les plus précaires
Le rapport issu des Assises du travail et publié le 24 avril préconise la portabilité des droits effectifs des travailleurs. Une revendication de longue date de la CGT. Le syndicat s’en réjouit, tout en insistant sur les conditions nécessaires pour que le dispositif fonctionne.
Changements d’entreprises, de statuts, de métiers, précarité de l’emploi… De nombreux travailleurs perdent l’accès à leurs droits du fait de l’évolution du marché du travail. Les plus précaires sont particulièrement concernés : ils sont peu voire pas du tout indemnisés en cas d’arrêt maladie ou d’accidents du travail et de maladies professionnelles ; l’acquisition de droits pour le chômage ou la retraite est plus compliquée pour eux. Et pour cause, leur pouvoir de négociation est limité. Pour remédier à ces difficultés, un récent rapport propose d’« assurer aux travailleurs des droits effectifs et portables tout au long de leur parcours professionnel ».
Ce rapport est celui des garants des Assises du travail, une initiative lancée par l’exécutif en décembre 2022 : Sophie Thiéry, présidente de la commission travail et emploi du Conseil économique social et environnemental (Cese), et Jean-Dominique Senard, président du groupe Renault. Le document, publié le 24 avril dernier, rappelle un chiffre-clé : « En 2017, les embauches de moins d’un mois représentent presque 70 % des embauches totales (50 % en 2000). »
Quels moyens financiers ?
Pour la CGT, l’idée de la portabilité n’est pas nouvelle. La confédération syndicale porte cette revendication depuis plus de vingt ans et se réjouit de sa reprise dans le cadre des Assises du travail, alors qu’elle n’a pas maintenu sa participation à cette initiative du fait de la réforme des retraites. Pour Mireille Stivala, secrétaire confédérale de la CGT, ce dispositif nécessite néanmoins des moyens financiers à la hauteur, afin que l’annonce de la portabilité « ne soit pas qu’un affichage ».
Tout dépendra de ses conditions de mise en application. Sur ce sujet, le rapport issu des Assises préconise le lancement d’une mission par des inspecteurs généraux de l’administration (IGA), des affaires sociales (Igas) et des finances (IGF), afin de faire le point sur les droits sociaux effectivement acquis par les plus précaires, vacataires, travailleurs indépendants ou des plateformes numériques… Le texte recommande également de mettre à l’agenda des discussions entre partenaires sociaux, sous l’égide de l’Autorité des relations sociales des plateformes de l’emploi (Arpe), la couverture du risque accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) « pour les travailleurs des plateformes de mobilité via un système de prélèvement obligatoire au 1er euro travaillé ».
Le portail unique, fausse-bonne solution ?
Enfin, le rapport mise sur la création d’un portail unique d’accès aux différents comptes sociaux. Un dispositif dont Mireille Stivala se méfie : « C’est devenu un leitmotiv de proposer un guichet unique. Encore faut-il lui donner les moyens de coordonner tous les acteurs, afin que cela permette effectivement aux travailleurs d’accéder à leurs droits. » Elle espère aussi qu’il ne s’agira pas uniquement de prestations virtuelles, dématérialisées. « Cela limiterait l’accès de certains travailleurs, moins familiers avec les connexions, met-elle en garde. Par définition, ceux qui en auront besoin vivent des situations complexes. La meilleure façon de les régler est d’avoir quelqu’un en face de soi pour se faire aider. »