© Johan Keslassy

Conduite du changement : jamais sans les salariés

par Nathalie Quéruel / juillet 2021

Déménagement d’un site, installation de nouvelles machines, mise en place du télétravail, réorganisation de services, restructuration… Les entreprises sont comme des organismes vivants, en perpétuelle transformation. Bien souvent, la conduite du changement est pratiquée de façon verticale, prérogative de la direction qui met sur la table un projet déjà ficelé sur lequel le CSE est consulté de façon formelle, sans pouvoir réellement intervenir. Et si les salariés formulent des réserves, ce n’est que la manifestation d’une « résistance au changement » qu’il s’agit de surmonter bien vite à grand renfort de tours de passe-passe managériaux. Il est temps de changer d’approche. Toute transformation, parce qu’elle entraîne des effets majeurs sur le travail, ne peut se passer de l’expérience de ceux qui le font. Au risque de rater ses objectifs, détériorant tout autant la performance de l’organisation que les conditions de travail. Que les salariés deviennent acteurs du changement ne relève pas de l’utopie. Chaque projet, y compris le plus modeste, est une occasion de l’expérimenter. Ce dossier montre comment il est possible de construire cette participation, d’organiser l’expression de chacun sur son activité quotidienne, de structurer l’action du CSE pour qu’il pèse davantage sur les choix. Une démarche d’autant plus nécessaire qu’elle est un gage de la préservation de la santé.

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L’inusable alibi de la résistance au changement

par Annabelle Chassagnieux Paul Gaudric, intervenants en santé au travail / juillet 2021

Les outils d’accompagnement des projets partent du principe que les objections des personnels relèvent avant tout de réactions conservatrices et passagères. Or la prévention ne peut se passer de leur regard sur les futures conditions de travail.

Pour mener des réformes d’envergure, les porteurs de projet et le management sont dûment formés aux méthodes de conduite du changement. Lesquelles font une large place à la façon de soutenir les salariés concernés. Pour gérer leurs « résistances », un outil s’impose : la « courbe du changement », déclinaison de la « courbe du deuil ». Cette dernière a été élaborée par la psychiatre suisse Elisabeth Kübler-Ross à partir de travaux de recherche menés auprès de malades en phase terminale. Ils montrent que la plupart des patients passeraient par cinq étapes successives – le déni, la colère, le marchandage, la dépression puis l’acceptation – face à l’annonce de leur mort prochaine.

Les travers d’une théorie psychologisante

Dans les années 1990, cette analyse fut reprise dans le champ managérial et appliquée à la conduite de projet. Par analogie, on considère que, face à un changement, les salariés doivent « faire le deuil » de ce qu’ils vont perdre dans leur future situation de travail. On se focalise alors sur les modalités qui vont leur permettre de parvenir au plus vite à la phase d’acceptation. Depuis les années 2000, particulièrement depuis l’affaire des suicides à France...

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