Dossiers de victimes de l'amiante à l'Andeva - © Nathanaël Mergui/Mutualité française
Dossiers de victimes de l'amiante à l'Andeva - © Nathanaël Mergui/Mutualité française

Des soutiens pour les victimes de risques professionnels

par Martine Rossard / juillet 2019

Anciens médecins du travail ou praticiens, ils ont créé l'Association Bernardino Ramazzini pour apporter leur expertise aux victimes d'atteintes professionnelles, aux côtés de structures engagées sur ce combat. Un nouvel appui pour la réparation.

Aider les victimes des accidents et maladies professionnels à accéder à leurs droits, tel est l'objectif principal de l'Association Bernardino Ramazzini, créée en mars dernier. Ce collectif a adopté le nom du célèbre professeur de médecine italien du XVIIe siècle, qui s'est intéressé très tôt aux atteintes à la santé liées au travail. Il regroupe, d'une part, des médecins et, d'autre part, des structures associatives ou syndicales déjà actives dans l'information et le soutien des victimes concernant la défense de leurs droits. Les praticiens apportent bénévolement leur expertise médicale sur des dossiers, au cours de permanences organisées par les structures au bénéfice de leurs adhérents.

Face à un système complexe

"Nous rédigeons des rapports médicaux après avoir rencontré les malades ou étudié leur dossier, afin de rechercher le lien entre leur travail et les atteintes à leur santé, expose Marie Pascual, médecin du travail en retraite et l'une des fondatrices de l'association. Nous sommes amenés à les aider dans toutes les étapes du contentieux de la reconnaissance des maladies professionnelles, ce qui relève le plus souvent du parcours du combattant." Son confrère Jean-Michel Domergue, lui aussi médecin du travail à la retraite, confirme ces difficultés, qu'il attribue à la complexité du circuit de reconnaissance des atteintes professionnelles, mais aussi à des refus abusifs, expertises biaisées, taux d'invalidité arbitrairement réduits et à un sentiment trop largement partagé que les victimes tentent de "profiter du système". Pourtant, la branche risques professionnels de l'Assurance maladie est loin de leur assurer une réparation intégrale des préjudices. Elle indemnise seulement et partiellement la perte de revenus résultant de l'incapacité à travailler, totale ou partielle, définitive ou temporaire.

L'Association Bernardino Ramazzini ne part pas de rien. Elle s'appuie sur le travail mené depuis trente ans par le Dr Lucien Privet, son président, à travers des permanences tenues par l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) et ses antennes locales ou au cabinet d'avocats TTLA (Teissonnière, Topaloff, Lafforgue, Andreu et associés), spécialisé dans l'indemnisation des victimes de catastrophes industrielles, sanitaires ou environnementales. "Tout au long de ma carrière, j'ai développé une pratique de conseil aux victimes qui peut être prolongée et amplifiée par l'association", déclare Lucien Privet, dont la thèse d'internat, déjà, portait sur les maladies professionnelles des mineurs. "Je lève le pied, mais certains médecins commencent à me remplacer sur des permanences, pour aider des malades confrontés à un système complexe et au mépris des caisses de Sécurité sociale", ajoute-t-il.

Partage d'expériences

Plusieurs permanences se tiennent déjà régulièrement à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), au Mans (Sarthe) et à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais). Certaines attendent l'arrivée d'autres médecins prêts à s'engager. "Notre action menée depuis vingt-trois ans dans la reconstitution des expositions liées à l'amiante, avec l'aide du Dr Privet, doit désormais s'élargir aux victimes de toutes les pathologies professionnelles et à leurs ayants droit", souligne Hélène Boulot, directrice de l'Andeva. Pour elle, l'intérêt de la création de l'Association Bernardino Ramazzini est d'assurer une approche collective, permettant le partage d'expériences et de connaissances, l'implication des salariés et militants associatifs et le soutien des expertises médicales et juridiques. Le collectif de médecins souhaite par ailleurs améliorer les systèmes de protection sociale et de prévention des risques, ainsi que la connaissance des pathologies professionnelles, et participer à toute action entreprise dans ce sens.