Les RPS sont-ils encore prioritaires ?

par Isabelle Mahiou / octobre 2013

Les risques psychosociaux (RPS) relèvent-ils encore d'une action prioritaire de la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) ? Si ces risques sont inscrits dans la précédente convention d'objectifs et de gestion signées entre l'Etat et la branche, et dans le projet 2014-2017, les déclarations du directeur des Risques professionnels (DRP) de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), Dominique Martin, sèment le doute.

Le 7 mars, devant l'instance nationale de concertation, qui réunit dirigeants et syndicats de salariés de la branche, il affirmait qu'il était "envisageable de procéder à des montages opérationnels en déléguant par convention les RPS à l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail [Anact] ou à un autre organisme public, sans pour autant que la branche se dédouane de ses responsabilités". Un discours qui, selon nos sources, aurait été tenu à plusieurs reprises, de façon plus tranchée, dans les Carsat. Comme à Orléans, le 27 juin, où le DRP aurait parlé de "fantasme" et "d'effet de mode" à propos des RPS. Cette position épouse la logique du récent rapport de la Cour des comptes sur la politique de la branche, qui prônait une approche assurantielle, fondée sur "la valeur du risque comme principal indicateur de sinistralité". En clair, l'importance d'un risque sera évaluée en fonction des dépenses qu'il génère pour les caisses. Le rapport critiquait ainsi la priorité accordée aux RPS, très peu reconnus, donc faiblement indemnisés. "Les caisses rejettent quasi systématiquement les demandes d'indemnisation pour des pathologies en lien avec des RPS, souligne Olivier Tompa, DS CGT de la branche AT-MP. Et du coup, les RPS ne pèsent rien en termes de sinistralité.""Il y a vingt ans, avec un tel raisonnement, on ne se serait jamais préoccupé du risque amiante", ironise Marc Benoit, délégué syndical CGT de l'Insitut national de recherche et de sécurité (INRS).

Nécessaire reconnaissance

"Dire que la Sécurité sociale ne se préoccupe plus des RPS est dangereux, car c'est considérer qu'ils ne constituent pas un risque professionnel", poursuit-il. Pour Henri Forest, de la CFDT, "il n'est pas illogique que les Carsat délèguent à l'Anact les actions sur l'organisation du travail et les risques psychosociaux. Mais il faut d'abord travailler à faire reconnaître les maladies professionnelles liées aux RPS, car s'il n'y a pas le bras armé de la pénalité, ce n'est pas opérant". Dominique Martin assure que "les RPS restent un objectif important. L'Anact et l'INRS ont des compétences reconnues en la matière, nous souhaitons mieux organiser les coopérations utiles". Traduction par Hervé Lanouzière, directeur général de l'Anact : "Nous réfléchissons aux moyens de relayer l'action des Carsat, par exemple en animant le volet diagnostic ou la formation à la prévention." Mais avec quelles forces ?